1914, Anatolie orientale. C'est au coeur de paysages sauvages et montagneux que vit la famille Tomassian : Vahé, le grand-père, Bedros et Achod, ses fils, Anna et ses deux enfants, Aram, 12 ans et Yéva, 14 ans. En avril 1915, toute la famille est massacrée sous les yeux d'Aram et Yéva. Commence alors la déportation et un véritable voyage aux enfers pour les deux adolescents arméniens.
Istanbul, 1896. Sous le règne du sultan Abdul Hamid, dit Le sultan rouge, une poignée de résistants arméniens prend en otage deux cents fonctionnaires de la banque impériale ottomane et réclame une série de mesures en faveur des deux millions de leurs coreligionnaires, qui vivent au sein de l'empire ottoman. Leurs revendications font suite à une série de massacres qui se sont déroulés quelques mois plus tôt à l'instigation du sultan, faisant près de 300 000 victimes. Parmi les résistants, un jeune homme d'une vingtaine d'années : Hovanès Tomassian. Au terme d'heures de négociation, les terroristes sont autorisés à quitter les locaux de la banque sains et saufs, mais à la condition de quitter la Turquie pour toujours.
Dix-huit ans plus tard, Anatolie orientale. C'est au cœur de cette région de Turquie, dans la ville d'Erzeroum, que vit la famille Tomassian. Il y a Vahé, le grand-père, ses fils, Achod et Hovanès. Lequel a fait partie, 18 ans auparavant, des preneurs d'otages de la banque ottomane... Et puis il y a Anna, l'épouse d'Achod et leurs deux enfants, Chouchane et Aram.
Roman-vrai
C'est à travers le regard de cette famille que le lecteur vivra la tragédie de 1915. Les Tomassian sont emportés par ce tourbillon dévastateur. Ne survivront que les deux adolescents Chouchane et Aram. Ce sont eux les héros de ce roman-vrai...
Article non signé paru dans Nouvelles d'Arménie Magazine, numéro 146, Janvier 2009p>
Préface de Charles Aznavour
Venez, crevez l'abcès, entrez dans cette sépulture dont peu de gens au pays du Croissant semblent vouloir reconnaître l'existence. Il est tellement plus facile de se réfugier dans l'ignorance… Marchez dans la boue, dans le sang, foulez du pied ces têtes tranchées, écartez sur votre passage ces corps pendus au bord des chemins, passez par-dessus ces femmes violées aux ventres ouverts et ensanglantés comme dans une boucherie. Voyez enfin ces petits enfants aux crânes fracassés…
« Cela n'est pas possible » plaiderez-vous.
Et pourtant si, cela fut possible. Non seulement au Cambodge, au Rwanda ou dans quelques autres pays en guerre ou en révolution, mais aussi en Turquie ottomane, au début du xxe siècle, sous le règne des Jeunes-Turcs. Approchez, venez vous rendre compte pour ne pas devenir à votre tour le complice silencieux des négationnistes et de la manipulation d'État. Les gens de mon origine ne peuvent dormir tranquilles. Nos morts n'ont pas de sépulture. Alors, qu'attendons-nous, que voulons-nous ? Peu de chose en vérité : que les hommes et les femmes du Croissant, lorsqu’ils trinquent à l'honneur, quand nous trinquons à la santé et les Juifs à la vie, puisent dans cet honneur pour reconnaître ce fait indéniable de notre passé commun.
Le temps n'est-il pas venu de réconcilier nos peuples, de déchirer les faux livres d'Histoire, de laver à tout jamais cette tache abominablement écarlate, de se libérer d'un mensonge d'État pour entrer, clair et limpide, dans cette Europe qui aujourd'hui doute et doutera plus encore demain ? Les jeunes générations, celles des après drames, qui ne sont en rien responsables du passé mais ô combien garantes de l'avenir, ont le droit de savoir et de se délier d'une faute qui n'est pas la leur.
Alors venez, crevez l'abcès et, comme je l’ai fait, entrez dans ce livre et vivez l’impensable.