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Association Culturelle Arménienne de Marne-la-Vallée (France)

Mariette CHAGUINIAN
( 1888 - 1982 )

L'auteur

 
Naissance le 2 avril 1888 à Moscou, décès le 20 mars 1982 à Moscou (Russie)
Chaguinian, Marietta Sergueevna.

Dans son ouvrage "Littérature et Révolution", Léon Trotski dit à propos d'elle :

La vague pré-révolutionnaire au début du siècle, la Révolution battue de 1905, l'équilibre strict mais instable de la contre-révolution, l'éruption de la guerre, le prologue de février 1917, le drame d'Octobre, tout cela frappa l'intelligentsia lourdement et sans cesse comme avec un bélier. Pas le temps d'assimiler les faits, de les recréer en images, et de trouver l'expression verbale de ces images ! Certes nous avons les Douze de Blok, et plusieurs œuvres de Maïakovsky. C'est quelque chose, un dépôt modeste mais non un paiement au compte de l'histoire, pas même un commencement de paiement. L'art s'est révélé impuissant, comme toujours au début d'une grande époque. Les poètes, qui n'avaient pas été appelés au sacrifice divin, se révélèrent, comme on pouvait s'y attendre, les plus insignifiants de tous les enfants insignifiants de la terre [4]. Les symbolistes, les parnassiens, les acméistes, qui avaient plané au-dessus des passions et des intérêts sociaux, comme dans les nuages, se retrouvèrent à Ekaterinodar avec les Blancs, ou dans l'état-major du maréchal Pilsudsky. Inspirés par une puissante passion wrangelienne, ils nous anathémisaient en vers et en prose.

Les plus sensibles et, dans une certaine mesure, les plus prudents, se taisaient. Dans un récit intéressant, Mariette Chaguinian raconte comment, pendant les premiers mois de la Révolution, elle enseigna le tissage dans la région du Don. Elle n'eut pas seulement à quitter sa table de travail pour le métier à tisser, elle dut aussi se quitter elle-même pour se perdre complètement. D'autres plongèrent dans le " Proletkult ", dans le " Politprosviet ", ou travaillèrent dans les musées et traversèrent de cette façon les événements les plus terribles et les plus tragiques que le monde ait jamais vécus. Les années de la Révolution devinrent les années d'un silence presque complet de la poésie. Ce n'était pas tout à fait à cause du manque de papier. Si l'on ne pouvait être imprimé alors, on pourrait l'être maintenant. Il n'était pas inévitable que la poésie fût favorable à la Révolution, elle aurait pu être contre elle. Nous connaissons la littérature des émigrés. C'est un zéro absolu. Mais notre propre littérature, elle non plus, ne nous a rien donné qui soit adéquat à l'époque."

Et plus loin :

Il est clair maintenant que l'attitude bienveillante et même "sympathique" de Mariette Chaguinian à l'égard de la Révolution prend sa source dans la moins révolutionnaire, la plus asiatique, la plus passive, la plus chrétiennement résignée des conceptions du monde. Le récent roman de Chaguinian, Notre Destinée, sert de note explicative à ce point de vue. Tout y est psychologie, voire psychologie transcendantale, avec des racines qui se perdent dans la religion. On y trouve des caractères "en général", de l'esprit et de l'âme, de la destinée nouménale et de la destinée phénoménale, des énigmes psychologiques partout, et, afin que cet amoncellement ne semble pas trop monstrueux, le roman se situe dans un asile pour psychopathes. Voici le très magnifique professeur, un psychiatre à l'esprit très fin, le plus noble des maris et des pères, et le moins courant des chrétiens ; l'épouse est un peu plus simple, mais son union avec son mari sublimée dans le Christ est totale ; la fille tente de se rebeller, mais plus tard s'humilie au nom du Seigneur. Un jeune psychiatre, confident supposé de ce récit, s'accorde entièrement avec cette famille. Il est intelligent, doux et pieux. Il y a aussi un technicien au nom suédois, exceptionnellement noble, bon, sage dans sa simplicité, tout rempli de patience, et soumis à Dieu. Il y a le prêtre Léonid, exceptionnellement avisé, exceptionnellement pieux et, bien sûr, comme sa vocation le lui commande, soumis à Dieu. Tout autour d'eux : des fous ou des demi-fous. C'est par eux qu'on apprécie la compréhension et la profondeur du professeur et, d'autre part, la nécessité d'obéir à Dieu qui n'est pas parvenu à créer un monde sans fous. Voici qu'arrive un autre jeune psychiatre. Il est athée celui-là, mais évidemment, il se soumet aussi à Dieu. Ces personnes discutent entre elles pour savoir si le professeur croit au diable ou considère le mal comme impersonnel, et ils seraient plutôt enclins à se passer du diable. On voit sur la couverture : " 1923, Moscou et Pétrograd. " Voilà un vrai miracle !

Les héros de Mariette Chaguinian, subtils, bons et pieux, ne provoquent pas la sympathie mais une totale indifférence qui, parfois, se transforme en nausée : en dépit de l'intelligence évidente de l'auteur, et à cause de tout ce langage bon marché, de cet humour vraiment provincial. Même les figures pieuses et soumises de Dostoïevsky comportent une part de fausseté, car on sent qu'elles lui sont étrangères. Il les a créées en grande partie contre lui-même, parce qu'il était passionné et avait mauvais caractère en toute chose, y compris en son christianisme perfide. Mariette Chaguinian elle, semble très bonne, bien que d'une bonté ménagère. Elle a enfermé l'abondance de ses connaissances et sa pénétration psychologique extraordinaire dans le cadre de son point de vue ménager. Elle-même le reconnaît et le dit ouvertement. Mais la Révolution n'est pas du tout un événement ménager. C'est pourquoi la soumission fataliste de Mariette Chaguinian jure si crûment avec l'esprit et la signification de notre époque. Et c'est pourquoi ses créatures très sages et très pieuses puent, si vous me passez le terme, la bigoterie.

Dans son journal littéraire, Mariette Chaguinian parle de la nécessité de lutter pour la culture partout et toujours. Si les gens se mouchent avec leurs doigts, apprenez-leur à se servir d'un mouchoir. C'est juste et audacieux, surtout aujourd'hui où la vraie masse du peuple commence à reconstruire sciemment la culture. Mais le prolétaire semi-analphabète qui n'est pas habitué à un mouchoir (il n'en a jamais possédé un), qui en a fini une fois pour toutes avec l'idiotie des commandements divins, et qui cherche à construire des rapports humains justes, est infiniment plus cultivé que ces éducateurs réactionnaires des deux sexes qui se mouchent philosophiquement le nez dans leur mouchoir mystique, compliquant ce geste inesthétique d'artifices artistiques très complexes, et d'emprunts déguisés et peureux à la science.

Mariette Chaguinian est contre-révolutionnaire par nature. C'est son christianisme fataliste, son indifférence domestique à tout ce qui ne relève pas du ménage qui lui font accepter la Révolution. Elle a simplement changé de siège, passant d'une voiture dans une autre, avec ses bagages à main et son tricot artistico-philosophique. Elle croit avoir conservé ainsi plus sûrement son individualité. Mais pas un fil de son tricot ne révèle cette individualité."

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Livre numéro 140
Mariette CHAGUINIAN --- Cliquer pour agrandir A travers l'Arménie soviétique
 
Titre : A travers l'Arménie soviétique / auteur(s) : Mariette CHAGUINIAN - traduit du russe
Editeur : Editions en langues étrangères, Moscou
Année : 1955
Imprimeur/Fabricant :
Description : 17 x 22 cm, 240 pages, illustrations en noir, 1 carte (dépliant), table des matières, notes
Collection :
Notes : Traduction du livre "A travers l'Arménie soviétique" paru aux éditions "L'Ecrivain soviétique" en 1952 et abrégé par l'auteur pour l'édition française
Autres auteurs :
Sujets :
ISBN :
Bibliothèques : Consultable à la Bibliothèque de la Cathédrale apostolique arménienne, Paris
Prix :

Commentaire :

L'ouvrage est tout imprégné de la nécessaire glorification du pouvoir soviétique : lire ci-dessous l'avant-propos :
"Avant-propos
L'Arménie est un pays très ancien dont la civilisation date de plus de deux mille ans. Les vestiges et les monuments antiques de sa culture en remplissent les plaines et les défilés.
Mais c'est aussi un pays très jeune, sa culture socialiste ne compte que trente-deux ans. Pourtant, en ces trente-deux ans, on a fait plus pour le bonheur du peuple qu'au cours des deux mille ans précédents. Le peuple arménien, appelé par l'historien "peuple martyr", n'est devenu le véritable maître et artisan de sa vie qu'après l'instauration du pouvoir soviétique (novembre 1920). Depuis lors, il vit dans l'abondance et la joie.
"Seule l'idée d'un pouvoir soviétique a apporté à l'Arménie la paix et la possibilité d'un renouveau national", a dit J. Staline.
La vie bouillonnante du pays des Soviets est difficile à suivre. Le présent est vite dépassé, les rêves d'avenir se transforment aussitôt en réalité.
Ce livre est composé de deux parties.
Dans la première, le lecteur se renseignera sur l'Arménie soviétique, sa nature, son climat, sa flore, sa faune, ses montagnes, ses rivières, sur le passé du peuple arménien,, sur sa participation à la Grande Révolution d'Octobre, sur la défense du pays pendant la Grande Guerre Nationale, sur l'édification du socialisme en Arménie, sur son épanouissement actuel.
Dans la seconde partie, le lecteur trouvera une description plus précise des régions de l'Arménie, de leurs particularités géographiques, économiques et culturelles."

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