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Association Culturelle Arménienne de Marne-la-Vallée (France)

Le président Kotcharian reçu à la Mairie de Paris le 13 février 2001

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carton d'invitation

MAIRIE DE PARIS
DIRECTION GÉNÉRALE DE L'INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION
DISCOURS DE
MONSIEUR JEAN TIBERI MAIRE DE PARIS

Visite d'Etat de Monsieur Robert KOTCHARIAN Président de la République d'Arménie
Mardi 13 février 2001
HÔTEL DE VILLE - 75196 PARIS RP

Monsieur le Président, Madame,
C'est pour moi un honneur et un très grand plaisir que d'accueillir, à l'Hôtel de Ville, le Président de la République d'Arménie et son épouse, a qui je suis heureux de présenter mes respectueux hommages. Votre présence, celle des hautes personnalités qui vous accompagnent viennent aujourd'hui redire l'ancienneté, la densité et la vigueur des liens étroits qui unissent nos deux peuples, nos deux pays et nos deux capitales.

A travers votre personne, Paris et son maire se réjouissent de recevoir, en ce jour, le représentant et le continuateur d'une Arménie millénaire et le Président d'une jeune République incarnant un grand peuple et porteuse des espérances de sa diaspora.

Pour cette première visite d'Etat que vous effectuez en France, je serais d'ailleurs profondément heureux si vous aviez le sentiment d'être accueillis, ici même, à Paris, par les membres d'une famille certes éloignée par la géographie mais cependant si proche par le coeur. Entre l'Arménie et la France, en effet, tout est d'abord, je crois, question d'affinités ; affinités entre deux cultures qui ont en partage la même foi, le même humanisme chrétien, qui ont également en commun un même amour pour l'écriture.

Entre nos deux peuples, Monsieur le Président, la rencontre se fit bien avant les croisades. Mais de ce temps lointain où Arméniens et Francs combattirent côte à côte, comme ils devaient le faire bien plus tard, au cours des deux guerres mondiales, est née une profonde et durable alliance. Une alliance illustrée, au premier chef, par Léon V de LUSIGNAN, Français et dernier roi d'Arménie, dont le cénotaphe côtoie, dans la basilique Saint-Denis, les tombeaux de nos rois ; ou encore par cette figure lumineuse du Père jésuite POIDEBARD, nommé, en 1918, par CLEMENCEAU, ambassadeur de France à Erevan auprès de la toute jeune République d'Arménie, et qui se fit, auprès des négociateurs du Traité de Versailles, l'infatigable défenseur de l'autonomie arménienne.

Cette profonde communauté de destin explique qu'au seuil de ce siècle, après les massacres de 1894 et l'atroce génocide de 1915, nombreux furent ceux qui, parmi les rescapés, choisirent la France. Malgré la douleur, malgré le déracinement, ils se sont, avec leurs enfants, admirablement intégrés dans notre pays. Un pays qu'ils ont fait leur, en lui apportant tout leur courage, tout leur amour et même leur vie, qu'ils donnèrent dans la Résistance, aux côtés de leurs frères français. Souvenons-nous ainsi de Missak MANOUCHIAN et de ses vingt-trois camarades fusillés par les Allemands le 21 février 1944.

C'est dire h, reconnaissance que nous devons aLx fils de l'Arménie et à la communauté arménienne. Une communauté qui a donné à la culture et au génie français une créativité exceptionnelle et une pléiade de talents qui se sont illustrés dans tous les domaines artistique, intellectuel, économique. Une communauté qui a donné à la France des personnalités de premier plan qui ont contribué et contribuent à la richesse et au rayonnement de notre pays et de sa capitale.

Voilà pourquoi j'ai souhaité répondre à la demande de tous les représentants de la communauté arménienne de France, regroupés au sein du Comité du 24 avril, présidé par Monsieur Alexis GOVCIYAN, d'ériger à Paris un monument en hommage aux Arméniens volontaires de 1914-1918, aux anciens combattants et résistants morts pour la France de 1939-1945, mais aussi naturellement aux victimes du génocide de 1915. Un monument signé par David EREVANTZI qui représentera dans le bronze l'une des très grandes figures de l'Arménie, celle du Révérend Père KOMITAS, qui, déporté le 24 avril 1915, trouvait refuge en France. II est juste en effet que cette terre de France, que nombre de vos concitoyens ont choisie et aimée, rende hommage, à Paris, à la mémoire de vos disparus lui sont aussi les siens.

Monsieur le Président, malgré tant de drames et tant d'épreuves, le peuple arménien a survécu. II est parvenu à sauvegarder sa foi, sa langue et ses moeurs. Attaché à une histoire tourmentée mais exceptionnellement brillante, il a cultivé les vertus d'un patriotisme ardent. Et aujourd'hui, la République d'Arménie et sa capitale, Erevan, sont bien vivantes et fermement engagées sur le chemin de la démocratie. Pour autant, vous présidez également aux destinées d'un jeune Etat qui doit affronter de grands défis : garantir la solidité d'une indépendance et d'une souveraineté reconquises ; renouer pleinement avec ses racines et son histoire pour assurer son destin ; s'ouvrir au monde. Dans ce grand et ambitieux dessein, la France est, vous le savez, à vos côtés.

Renouer avec le passé, avec une identité et avec une histoire que vous avez toujours veillé à préserver, c'est d'abord affaire de culture. Comme toute grande culture, la vôtre est à la fois particulière et universelle. Elle a donné au monde des chefs-d'oeuvre de la pensée et de l'architecture. Elle a conféré à l'Arménie une dimension et une densité historiques. L'exposition qui se tient actuellement à Paris, au Pavillon des Arts, et que nous aurons le plaisir de visiter ensemble, cet après-midi, en témoigne : consacrée à la cité millénaire d'Ani, capitale de l'Arménie, elle restitue l'histoire de " la ville aux cent palais et aux mille églises ", qui, dans ce qui fut le premier royaume chrétien, s'affirma un foyer de civilisation d'une incomparable richesse. Une somptueuse exposition dont j'avais souhaité et décidé la réalisation voici trois ans, ici même, avec le maire d'Erevan.

Cette civilisation brillante, riche et ancienne, c'est le socle même de votre jeune Etat. Au carrefour de plusieurs mondes, trait d'union entre l'Orient et l'Occident, l'Arménie s'est tournée vers l'Europe. Votre récente adhésion au Conseil de l'Europe et la signature d'accords de coopération avec l'Union Européenne sont venues le souligner. Par ailleurs, Monsieur le Président, nous soutenons également vos choix courageux pour faire de l'Arménie, au coeur du Caucase, un espace de paix, de tolérance et de prospérité. Le choix aussi d'une économie en croissance, dans un Etat où le droit et la démocratie fondent les rapports humains. Vous vous êtes ainsi attaché à assainir l'économie, mettant en oeuvre une ambitieuse politique de libéralisation et d'ouverture. De la sorte, vous avez réussi à juguler un mal endémique de l'Arménie, l'inflation et vous avez su favoriser une croissance soutenue. Ce redressement de l'économie arménienne est une longue entreprise que vous menez avec une ténacité et une efficacité que je veux aujourd'hui saluer. Une entreprise qui rencontre notre plein et entier soutien comme en témoignent les coopérations étroites mises en oeuvre entre nos deux pays. Notre ambition est que ces coopérations, qui ont vocation à se renforcer encore, contribuent à l'édification d'une Arménie libre, dynamique et ouverte sur le monde.

Un avenir auquel, vous le savez, j'ai souhaité pleinement associer Paris, notamment en développant avec votre capitale Erevan une relation privilégiée, qui repose sur une double coopération. Elle a d'abord pour fondement le Pacte d'amitié et de coopération que nous avons, ici même, signé le 10 novembre 1998 et qui a déjà porté de précieux fruits, à l'image de l'exposition consacrée à la cité millénaire d'Ani. Elle passe également par l'Association Internationale des Maires Francophones, que j'ai l'honneur de présider, et à laquelle Erevan a adhéré en mai 1998. Les actions engagées depuis lors ne manquent pas d'illustrer la part que peuvent et doivent prendre les collectivités locales, et singulièrement les capitales, dans la coopération entre les peuples. Elles montrent également qu'à travers l'usage et l'amour communs d'une langue, la francophonie cimente la base et le cadre d'une amitié profonde et d'une solidarité agissante.

Monsieur le Président, Madame, la Municipalité de Paris s'honore aujourd'hui de votre visite. Au moment où votre pays se modernise et s'ouvre, et consent pour cela de grands sacrifices, elle tient à vous manifester l'attachement qu'elle porte à votre personne, au peuple arménien et à l'Arménie éternelle.

Je forme avec les Parisiens et tous mes concitoyens des voeux sincères et ardents pour que la République d'Arménie connaisse l'avenir serein auquel elle aspire et auquel elle a un droit insigne.


INTERVENTION DE S.E. MONSIEUR ROBERT KOTCHARIAN PRESIDENT
DE LA REPUBLIQUE D'ARMENIE LORS DE LA RECEPTION A LA MAIRIE DE PARIS

Paris, le 13 février 2001

Monsieur le Maire, Madame Tibéri, Monsieur le Ministre, Mesdames et Messieurs, Chers Amis,

Je voudrais vous assurer que pour moi personnellement et pour mon épouse, aussi bien que pour la délégation qui m'accompagne, il est très agréable d'être à Paris. Je suis profondément reconnaissant pour ce magnifique accueil que les pouvoirs municipaux, ainsi que Vous personnellement, Monsieur le Maire, avez réservé en notre honneur: Je remercie également tous, ceux ici présents d'être si nombreux aujourd'hui.

Les relations entre l'Arménie et la France ont trouvé un nouvel élan depuis que l'Arménie a retrouvé son Indépendance. Elles sont fondées sur les liens d'amitié historiques de nos peuples qui prend source à partir du Moyen Age.

Votre ville a été particulièrement accueillante pour les Arméniens. Paris, en tant que berceau de la civilisation européenne, est devenu un des centres de formation pour les Arméniens dans les domaines politique, culturel et autres. C'est ici que de nombreux intellectuels arméniens se sont instruits et formés, qui par la suite, ont joué leur rôle dans l'histoire de l'Arménie et du peuple arménien. Aujourd'hui, Paris est la ville de milliers d'Arméniens qui sont, d'une façon générale, les héritiers des rescapés du Génocide Arménien. Ils prennent, aujourd'hui, une part active à la vie culturelle, commerciale, administrative de votre ville. Plusieurs d'entre eux représentent une source de fierté tant pour la France que pour l'Arménie.

II y a actuellement des dizaines d'organisations, d'églises, de maisons de culture, d'écoles et de journaux arméniens qui fonctionnent à Paris. C'est ici, à Paris, que la vie communautaire arménienne est centralisée : avec ses activités et manifestations culturelles.

Dans les Instituts et Ecoles Supérieures de votre ville, des centaines d'étudiants ressortissants d'Arménie font leurs études. Paris est aussi un centre particulier où régulièrement se mettent en place des échanges culturels et artistiques entre l'Arménie et la France.

Ce soir, beaucoup d'entre vous assisteront au concert exceptionnel du Choeur National d'Arménie à la Cathédrale Notre Dame de Paris.

C'est justement ce type de relations très actives qui ont débouché sur l'adhésion de la Capitale d'Arménie, en mai 1998, à l'Association Internationale des Capitales Francophones, ainsi que, quelque mois après, sur le pacte de coopération entre Paris et Erévan. Nous espérons que, dans ce contexte, l'avenir sera marqué par une coopération encore plus dynamique entre nos Capitales. L'exposition inaugurée, il y a une semaine ici, par la Mairie de Paris avec le soutien de l'Union Générale Arménienne de Bienfaisance en est un des premiers témoignages.

Monsieur le Maire,
Je voudrais citer les mots que vous avez eu l'occasion de prononcer " Personne ne peut oublier les Arméniens qui, à partir de 1916, ont couronné de gloire leurs noms au sein des Légions Etrangères dans différentes régions de France... On n'oubliera jamais les sacrifices dont les Arméniens ont fait preuve, lors de la dernière guerre mondiale, au nom des idées de justice et de liberté. Ils étaient dans la Résistance - à côté de leurs frères Français ".

Je peux dire que les Arméniens à leur tour, n'oublieront jamais que les Français ont donné refuge à des dizaines de milliers de réfugiés et d'orphelins en partageant avec eux leur pain quotidien. On n'oubliera jamais la révolte du début du siècle des intellectuels français contre les barbaries et pour la protection des victimes innocentes. On n'oubliera jamais le soutien de votre pays, ainsi que des millions de Français à une Arménie blessée par le tremblement de terre.

Komitas symbolise le génie de l'âme et de l'esprit arménien. Komitas est également le symbole de toutes les victimes de la tragédie du peuple arménien de 1915. Dans nos yeux, la décision d'ériger le monument de ce Grand Homme au centre de la ville exprime une sorte de respect et de récompense à notre peuple. Au nom de l'Arménie et du peuple arménien, je remercie très profondément tous les Parisiens, les membres du Conseil Municipal, et Vous personnellement, Monsieur le Maire, pour cette belle illustration de fraternité et de solidarité ; d'autant plus qu'elle survient tout de suite après la reconnaissance du Génocide Arménien par le Parlement français.

Les dix ans qui se sont écoulés après l'indépendance étaient pour l'Arménie des années de redécouverte de son identité. Tout de suite après le rétablissement de l'Indépendance, nous avons déclaré la politique européenne comme une direction constante pour l'Arménie. Nous pouvons constater avec satisfaction que le niveau actuel des réformes mises en place a rendu possible l'adhésion de l'Arménie au Conseil de l'Europe en tant que membre à part entière. La France a eu un rôle sensible dans ce processus.

L'entrée de l'Arménie dans le nouveau millénaire est marquée par des événements exceptionnels. Et il est symbolique que la France y occupe une place particulière, même si le 21e siècle n'a qu'un mois et demi d'histoire.


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